«Comme tous les destins exemplaires, la vie de Victor Hugo semble une succession de nécessités. […] Prolifique, surabondant, travailleur infatigable, il ne se réduit pas à ses écrits. Une vie pleine, engagée, des amours, des voyages, une carrière officielle, tous les honneurs, et aussi un regard d’artiste qui nous vaut de superbes dessins : tout cela nous apparaît comme le contrepoids nécessaire et comme l’aliment de cette œuvre olympienne. […] C’est l’amour de la vie, l’exceptionnelle fécondité de cette machine à transformer la vie en mots, en images qui dictent à Hugo cette œuvre gigantesque.»
Jaques Rigaud, avant-propos de l’édition de Tony Bourg et Frank Wilhelm,
Le Grand-Duché de Luxembourg dans les carnets de Victor Hugo (Luxembourg, 1985)
Naissance, le 26 février à Besançon de Victor Marie Hugo d’une mère vendéenne et d’un père militaire républicain et bonapartiste. Deux frères aînés : Abel et Eugène.
VH fonde son Conservateur littéraire.
Bug Jargal, roman.
Odes et Poésies diverses. Mariage avec Adèle Foucher. Le couple aura cinq enfants : Léopold (mort après quelques mois), Léopoldine, Charles, (François-)Victor, Adèle.
Han d’Islande, roman.
Nouvelles Odes.
Odes et Ballades. Bug Jargal (seconde version).
Préface de Cromwell. VH s’annonce comme chef du romantisme français.
Les Orientales, poèmes; Le Dernier Jour d’un condamné, roman; Marion Delorme, théâtre.
Hernani, théâtre. Triomphe du romantisme, dont VH est maintenant le coryphée.
Notre-Dame de Paris, roman; Marion Delorme, théâtre; Les Feuilles d’automne, poèmes.
Le roi s’amuse, théâtre.
Liaison avec Juliette Drouet. Lucrèce Borgia, Marie Tudor, théâtre.
Littérature et Philosophie mêlées; Claude Gueux, roman.
Angelo, Tyran de Padoue, théâtre; Les Chants du crépuscule, poèmes.
Les Voix intérieures, poèmes.
Ruy Blas, théâtre.
Premier voyage sur le Rhin.
Les Rayons et les ombres, poèmes.
Élection à l’Académie française.
Le Rhin, récit de voyage.
Échec de son drame romantique Les Burgraves. Sa fille Léopoldine se noie dans la Seine à Villequier avec son mari Charles Vacquerie.
Nomination par Louis-Philippe comme pair de France. Début de la rédaction des Misères, qui deviendront Les Misérables.
VH est élu député de Paris après la révolution de février : discours contre la peine de mort, pour la liberté de la presse.
Quatre discours.
2 décembre. Coup d’État du président de la République Louis-Napoléon Bonaparte, que VH avait d’abord soutenu. VH tente d’organiser la résistance, puis est obligé de se réfugier en Belgique. Début de son exil qui durera dix-neuf ans, pendant lesquels il publiera surtout en Belgique.
Napoléon-le-Petit, pamphlet, publié à Bruxelles. Installation dans l’île anglo-normande de Jersey.
Châtiments, poèmes satiriques. VH est initié aux tables tournantes.
Début d’une période d’intense activité créatrice (littérature, peinture, décoration) favorisée par l’exil.
Les Contemplations, le plus important recueil poétique. Achat de Hauteville House, dans l’île anglo-normande de Guernesey. VH y vivra pendant le reste de son exil, mais sa famille séjournera aussi à Bruxelles.
La Légende des Siècles, première série, poèmes.
Les Misérables (5 parties en 10 tomes) publiés à Bruxelles et à Paris. Immense succès : bonnes feuilles, traductions, parodies. Voyage touristique sur le Rhin allemand à travers les Ardennes belges et luxembourgeoises, qu’il répétera en 1863, 1864 et 1865.
William Shakespeare, essai.
Les Chansons des rues et des bois, poèmes.
Mille Francs de récompense, théâtre; Les Travailleurs de la mer, roman.
Mangeront-ils ?, théâtre; Introduction à Paris-Guide, pour l’exposition universelle; La Voix de Guernesey, poésie.
Mort d’Adèle Hugo. VH n’épousera pas Juliette Drouet, mais leur union affective durera jusqu’à leur mort.
L’homme qui rit, roman.
14 juillet: VH plante dans son jardin de Hauteville House « le chêne des États-Unis d’Europe ». 2 septembre: capitulation de l’empereur Napoléon III à Sedan, suivie de son abdication. 4 septembre : proclamation de la République à Paris.5 septembre : retour de VH à Paris.
13 mars: mort de Charles Hugo à Bordeaux où son père, élu député, avait suivi l’Assemblée nationale. 18 mars : enterrement de Charles au Père-Lachaise, le jour même où est proclamée la Commune de Paris. VH se rend à Bruxelles pour y régler la succession de Charles. Ayant offert l’asile politique aux communards poursuivis à Paris pendant la « semaine sanglante », VH est expulsé de Belgique, le 30 mai.
1er juin: VH et le reste de sa famille arrivent à Luxembourg-ville. Il ne quittera le Grand-Duché que le 23 septembre 1871.
L’Année terrible, poèmes (certains écrits en Luxembourg).
Quatrevingt-treize, roman.
Actes et Paroles, textes de discours (il y aura trois volumes: Avant, Pendant et Après l’exil).
La Légende des siècles, deuxième série ;L’Art d’être grand-père, poèmes; Histoire d’un Crime, récit historique.
Le Pape, poème.
La Pitié suprême, poème.
Religions et Religion, poème ;L’Âne, poème.
Les Quatre Vents de l’esprit, poèmes. Legs testamentaire de ses manuscrits à la Bibliothèque nationale de Paris.
Torquemada, théâtre.
Mort de Juliette Drouet. La Légende des siècles, troisième série; L’Archipel de la Manche, essai.
22 mai: Mort de VH à Paris. Funérailles nationales, 1er juin : cercueil exposé sous l’Arc de Triomphe, puis conduit au Panthéon.
Début de la publication des Œuvres complètes, édition dite « de l’Imprimerie nationale », le dernier des 45 volumes paraissant en 1950.
Célébration du centenaire de sa naissance.
Inauguration de la Maison de Victor Hugo dans son ancien appartement, 6, place des Vosges à Paris ; musée créé par l’écrivain Paul Meurice, ami de VH et exécuteur testamentaire.
Donation de Hauteville House à Ville de Paris par Jeanne, la petite-fille de VH, et les enfants de son petit-fils Georges (Jean, Marguerite, François). Depuis: maison musée.
Célébration du cinquantenaire de sa mort. Inauguration de la Maison et du buste (Rodin) de Victor Hugo, à Vianden.
Célébration du cent cinquantenaire de sa naissance.
Inauguration du Musée Victor Hugo – Maison Vacquerie, à Villequier.
Célébration du centenaire de sa mort.
Inauguration de la Maison littéraire de Victor Hugo au château des Roches, à Bièvres.
Célébration du bicentenaire de la naissance de VH.
En compagnie de Juliette Drouet, de l’un ou l’autre de ses fils et de proches, il arrive en Luxembourg en provenance de Guernesey, via Bruxelles, Dinant et les Ardennes belges, avant ou après le voyage annuel sur le Rhin allemand. Il en parle dans ses lettres et les notes de ses carnets et albums de voyage, où figure aussi maint dessin souvenir :
1er voyage touristique de l’exil: Clervaux, Vianden, Echternach, puis l’Allemagne; au retour: Larochette, Luxembourg.
Mersch, Larochette, Luxembourg, puis l’Allemagne; au retour au mois de septembre: Echternach, Vianden (excursion à Falkenstein, en Prusse rhénane), Clervaux.
Larochette, Luxembourg, puis l’Allemagne.
Au retour d’Allemagne: Echternach, Vianden (excursion à Bourscheid), Clervaux.
Du 1er au 8 juin: Luxembourg; du 8 juin au 22 août: Vianden (nombreuses excursions dans le pays et en Prusse rhénane); du 22 au 26 août: Diekirch (excursions dans le pays); du 26 août au 23 septembre: Altwies / Mondorf (excursions dans l’arrière-pays, en Prusse rhénane et en Lorraine annexée). Retour à Paris. Il ne reverra plus le Grand-Duché.
Au total, pendant ces passages ou séjours, il a écrit une cinquantaine de poèmes et fait une soixantaine de dessins et de lavis.
Vous trouverez sur cet écran un choix de citations tirées des oeuvres littéraires de Victor Hugo, de ses carnets de voyage ou de sa correspondance. Tous ces textes parlent d’une façon ou d’une autre du Luxembourg d’Ancien Régime ou du pays moderne.
On y découvre un poète historien, témoin social, touriste, ‘archéologue’, homme politique, anticlérical. Autant de visages d’un esprit tour à tour critique, plein d’humour et d’attendrissement, toujours vif.
Le classement suit la chronologie. On trouvera un plus grand choix de citations sur les bornes informatiques de notre musée à Vianden.
« Tout s’en va. – Nous avons, depuis Philippe Quatre, perdu le Portugal, le Brésil, sans combattre, en Alsace Brisach, Steinfort en Luxembourg »
Ruy Blas, III,2 – 1838
« Abjection ! – L’empire avait de grands piliers, Hollande, Luxembourg, Clèves, Gueldre, Juliers, Croulés ! Plus de Pologne et plus de Lombardie ! »
Les Burgraves – 1843
« Tout ce que nous voyons est superbe, les Ardennes sont un enchantement. »
Lettre envoyée de Vianden à sa femme Adèle à Guernesey
Lettre – 7 août 1862
« Partis [de Vianden] à 4 h. pour Echsternach [sic]. – Traverse – Mauvais chemins – Pluie – Deux lieues à pied – Routes effondrées – Poteaux des routes vaguement lus au clair de lune. Chemin perdu. – Arrivés à Echsternach à 1 h. 1/2 du matin. – Réveillé l’hôtel du Cerf. – Soupé. – Couché à 3 heures. / 8 août – Déjeuné à l’hôtel du Cerf. – Incident – la vieille maison, les vieilles dames et la jeune fille – Visite au couvent et à l’église romane en ruines – Paris à 3 h. »
Carnet – 7/8 août 1862
« Revu Luxembourg, décidément très curieux et très beau. – Charmante église avec des magnificences de la 2e Renaissance – Admirable vue du haut Pont – Le soir, au clair de lune, plus beau encore. »
Carnet – 24.08.1863
« Après le dîner [à Vianden], musique subite dans la rue. On ouvre les fenêtres. C’est une sérénade. Vingt musiciens avec un drapeau. Très belle musique. Le président de la société chorale m’adresse une allocution, j’y réponds. Hourrahs. Tout cela est imprévu, spontané et charmant. Les musiciens sont en blouse, ils sortent du travail. Il y a huit chandelles de suif pour éclairer leurs pauvres pupitres. Foule dans la rue. Puis le silence s’est fait, et je suis monté solitairement sur la montagne. Lune voilée. Mélancolique aspect des vallées où rampe une rivière de brouillard. Le spectre de la ruine debout dans cette ombre. Les chats-huants crient : hou ! hou ! hou ! »
Carnet – 25.09.1863
« Les comprachicos, comme les tchiganes et les gypsies se donnaient des rendez-vous de temps en temps les chefs échangeaient des colloques – ils avaient au dix-septième siècle quatre principaux points de rencontre. Un en Espagne : le défilé de Pancorbo ., un en Allemagne : la clairière dite de la mauvaise Femme, près Diekirsch [sic : pour le rocher de la Haertgeslé près d’Altlinster], où il y a deux bas-reliefs énigmatiques représentant une femme qui a une tête et un homme qui n’en a pas, un en France […] un en Angleterre. »
L’Homme qui rit – 1869
« Afin de témoigner aux braves gens de l’Hôtel Koch [en face de la maison au coin du pont où il habitait à Vianden] que j’étais content d’eux, j’ai demandé à leur payer 6 fr. par jour au lieu de 5. »
Carnet – 11.06.1871
« […] ici [à Vianden] il n’y a pas de photographes. c’est un pays magnifique et sauvage où la chambre noire, le chlorure d’or et le nitrate d’argent sont inconnus. Le soleil, dans ce vallon un peu farouche, fait des fleurs et des fruits, et ne copie pas les hommes. »
Extrait d’une lettre envoyée le 11 juin 1871 de Vianden à son confrère parisien, le critique littéraire Jules Janin
Lettre publiée en 1872 comme fac-similé dans l’album «L’Autographe. Evénements de 1870-1871» (Paris, Le Figaro)
« «JJ. [Juliette Drouet] a recommencé à copier mon manuscrit. J’intitulerai ce livre L’Année Terrible.» »
Carnet – 14.06.1871
« Ce soir j’étais rentré me coucher à dix heures. Je dormais. On frappe violemment à ma porte. Je m’éveille. Je vois une grande clarté. Il me semblait qu’il fît soleil dans ma chambre. Il était minuit. Je vais à la fenêtre. Lueur immense sur la ville [Vianden], sur la montagne et sur la ruine. Je me retourne et je vois à deux cents pas de la maison comme un cratère en éruption. Dix maisons brûlaient …. »
Carnet – 14.07.1871
« Aujourd’hui, dans son paysage splendide que viendra visiter un jour toute l’Europe, Vianden se compose de deux choses également consolantes et magnifiques, l’une sinistre, une ruine, l’autre riante, un peuple. »
Discours aux Viandenois
20.07.1871
« Le curé de Vianden a dit hier dimanche en chaire : ‘Le diable avait sur la terre trois religions, les Luthéristes, les Calvinistes et les Jansénistes. Maintenant il en a une quatrième, les Hugonistes. »
Carnet – 24.07.1871
« Je cultive la terre et je lis Shakespeare en anglais et Victor Hugo en français. »
Déclaration d’un paysan luxembourgeois à Victor Hugo à Vianden.
Carnet – 28.07.1871
« J’ai dessiné sur mon livre de voyage la grande toile d’araignée à travers laquelle on aperçoit la ruine de Vianden comme un spectre. Vraie besogne d’un 13. »
Carnet – 13.08.1871
« La douche [à Mondorf] fait plaisir, le breuvage pas. »
Carnet – 27.08.1871
« On quitte avec regret tout lieu où on a eu le temps de prendre des habitudes. Les habitudes sont nos racines. »
En quittant définitivement le Luxembourg.
Carnet – 23.09.1871
« Cette crypte était l’oubliette. Tout donjon avait la sienne. […] Jadis, aux temps féodaux, c’était dans cette chambre que se faisait l’écartèlement, par un procédé moins tapageur que les quatre chevaux. […] On peut voir encore aujourd’hui une chambre de ce genre à Vianden. »
Quatrevingt-treize – 1874
En savoir plus